L’Event Smart Energy a fêté sa 15e édition fin août à l’Aula Energypolis de Sion. En présence d’environ 150 spécialistes de l’énergie, la conférence a été l’occasion de revenir sur les évolutions du domaine de l’énergie depuis 2011. Les orateurs les plus marquants des dernières années sont venus sur scène pour partager leurs constats et vérifier si les promesses de l’époque ont été tenues. La flexibilité et l’innovation sont les clés du développement.
L’Event Smart Energy a été lancé en août 2011, quelques mois après l’accident nucléaire de Fukushima. Cet évènement grave a été à l’origine d’une prise de conscience mondiale en faveur d’une transition énergétique sans recours aux énergies fossiles. Nicolas Charton, directeur de E-Cube, a ouvert la manifestation en retraçant l’évolution du secteur de l’énergie. Ce dernier est passé d’un système dominé par le fossile, aux prix bas et à la flexibilité assurée par l’hydroélectricité, à un paradigme où la transition énergétique est au centre, avec des investissements massifs dans le renouvelable et le stockage. « Ce basculement amène de nouveaux défis : contraintes sur les réseaux, explosion du coût de l’énergie de réglage, incertitudes de marché et nécessité de rémunérer la flexibilité ». Les prochaines années seront marquées par la gestion fine et risquée de ces équilibres.
René Kerkmeester, Global Vice President chez Capgemini, a ensuite fait un panorama des enjeux pour les réseaux électriques. « Si on ne fait pas attention, le réseau sera le goulet d’étranglement de la transition énergétique ». Or, les opérateurs font face à un tsunami de changements. Ils doivent avant tout investir dans l’innovation et la flexibilité.
Encore de gros efforts d’investissements
De son côté, Markus Moor (Emerald Technology Ventures), a rappelé que les investissements mondiaux dans la transition énergétiqueatteignent 2’000 milliards de dollars par an, soit une augmentation de près de 100 fois depuis les premiers jours des conférences climatiques. Pourtant, ce flux massif doit encore plus que doubler pour s’aligner sur les objectifs de l’Accord de Paris.
La matinée s’est poursuivie par une table ronde qui a réuni Sylvia Marra (OIKEN), Assia Garbinato (Romande Energie), Emanuele Colombo (Swissgrid), Christian Schaffner (ETHZ) et Michael Weinhold (Siemens). Lors des débats, il est apparu que les innovations digitales les plus utiles aux réseaux électriques étaient l’intelligence artificielle (notamment pour l’optimisation), la cybersécurité ou le pilotage à distance. Les intervenants ont insisté sur le rôle central des données, mais aussi sur les défis liés à leur exploitation et à la tarification dynamique. La question des talents est également critique : attirer et retenir des compétences digitales dans le secteur énergétique reste compliqué.
Pénurie d’électricité : la situation s’améliore
Après la pause de midi, Philippe Jacquod, professeur à la HES-SO Valais-Wallis, est revenu sur les risques de pénurie d’électricité dans notre pays.En comparaison avec 2022, la situation évolue dans la bonne direction, grâce notamment à l’augmentation de la disponibilité de l’énergie nucléaire française. Il est toutefois impératif de signer un accord avec l’UE, selon Philippe Jacquod. Ce dernier insiste sur la nécessité de poursuivre le développement de l’énergie renouvelable, et notamment du solaire photovoltaïque. « C’est une des clés pour disposer d’un système électrique fiable, renouvelable et abordable, plutôt que de miser sur des gains financiers promis par la libéralisation et autres dérégulations ».
Nicolas Musy, fondateur de China Integrated, a fait un panorama du développement de la Chine dans le domaine de l’énergie. Les capacités de ce pays sont incroyables. « La Chine peut produire deux fois plus de panneaux solaires et trois fois plus de batteries que ce que le monde demande chaque année ». Les produits chinois créent une désindustrialisation dans les autres pays, mais il reste intéressant de pouvoir investir ou travailler en Chine pour les entreprises suisses.
Les start-up peinent à croître rapidement
Eric Plan (CleantechAlps), accompagné de Simon Delalay (Imperix), Fabrizio Lo Conte (eSMART) et Florent Cadoux (Roseaux Technologies) ont cherché à comprendre, lors d’un panel de discussion, pourquoi les start-up du domaine de l’énergie avaient de la peine à croître rapidement. Les raisons sont multiples et sont notamment liées au morcellement des acteurs, à la difficulté d’accès au marché ou encore d’un cadre réglementaire très figé.
La journée du vendredi s’est conclue par la présentation d’Espen Mehlum du World Economic Forum. Il a rappelé que le système énergétique est de plus en plus interconnecté et soumis à des forces multiples : innovations technologiques, géopolitique, climat et évolutions sociales. Malgré des investissements records dans les renouvelables, l’énergie reste encore très carbonée et inégalement accessible. Pour progresser, il faut combiner ambition et capacité de mise en œuvre, avec des régulations stables, des infrastructures modernes, des financements mieux répartis et des compétences adaptées.
Des clés pour aider à modifier les comportements
L’Event Smart Energy avait débuté le jeudi soir par une conférence du journaliste et producteur Jonas Schneiter, qui a décrypté les freins qui empêchent de changer de comportement en faveur de la transition énergétique. Selon lui, si le dérèglement climatique reste si difficile à traduire en changements de comportements, c’est parce qu’il est perçu comme lointain, abstrait, et que nos cerveaux sont piégés par de nombreux biais cognitifs. Ainsi, l’information seule ne suffit pas : pour provoquer une vraie transition, il faut agir simultanément sur l’éducation, la responsabilisation, la motivation et l’engagement.
La soirée s’est conclue par les pitchs de trois start-up romandes lauréates du Smart Energy Start-up Pitch Contest 2024 : Solarsplit, Windworks et Evolium Technologies. Ces dernières ont détaillé les progrès faits par leurs entreprises en une année, en faveur de la transition énergétique.
La prochaine édition de l’Event Smart Energy est d’ores et déjà annoncée pour les 27 et 28 août 2026.
Retour en images sur l’édition 2025